Ce billet est surtout destiné à ceux et celles d'entre vous qui aiment lire en anglais, car les titres que je vais évoquer n'ont pas tous été traduits en français.
Le plus, pour moi dont les yeux fatiguent sur certaines pages à la typographie ridiculement petite, étant donné qu'ils sont aussi disponibles en version électronique.
Je commencerai par le plus récent, un roman publié cette année par l'écrivain américain Timothy Jay Smith, FIRE ON THE ISLAND.
Voilà un roman qui entraîne le lecteur (et même la lectrice) sur de nombreuses pistes, toutes aussi intéressantes les unes que les autres.
Le lieu, pour commencer : Vorvoulos, une île grecque, toute proche de la Turquie, qui voit arriver sur son rivage – tout comme Lesvos – de nombreux réfugiés fuyant la misère et la guerre, avec les diverses réactions que l'on imagine de la part des insulaires. Mais cet endroit magnifique est aussi décrit avec une précision remarquable, qui vous entraîne sur ses sentiers, son port, vous permet d'en sentir les odeurs, d'en apprécier les couleurs et d'en goûter les saveurs comme si vous y étiez.
Il y a aussi l'Histoire, et notamment celle des relations difficiles entre la Grèce et la Turquie. Éclairée avec pertinence dans ce roman, sa découverte permet de mieux comprendre les enjeux politiques d'aujourd'hui, et la difficulté que posent certaines relations entre les peuples.
Ensuite, et surtout, il y a les personnages, attachants et crédibles. Leurs relations, leurs inter-actions, à la fois simples et complexes. Leur présence, leur façon de parler, leur passé, leurs émotions, qui se tissent à la manière d'une fresque, rappelant en filigrane les magnifiques vases qui ont inspiré le poème de Keats : "Ode on a Grecian Urn". On s'éprend du héros principal, Nick Damigos, un agent du FBI, à mesure qu'il se découvre, avec ses forces, mais aussi ses faiblesses et ses blessures... Au passage, et avec une grande délicatesse, l'auteur aborde la difficile question de l'acceptation de la différence (ici, celle de l'homosexualité).
Et, bien entendu, tout ceci est mis au service d'une intrigue complexe, menée de main de maître, qui vous permet de suivre l'enquête sensible de ce héros, tandis qu'il tente de démasquer celui ou celle qui a intérêt à faire flamber cette île.
Voilà, j'ai tout dit. On aura compris que je me suis régalée à la lecture de ce roman*, et que je vous conseille vivement de vous l'offrir à la première occasion, ne serait-ce que pour aborder l'automne avec un rayon de soleil grec dans les yeux !
*Voir ici pour son résumé en anglais.
* * *
Deuxième coup de cœur de l'été, un roman court, d'un auteur qui me réjouit à tous les coups, John Boyne.
Son titre ? "My brother's name is Jessica".
Voilà un livre qui a suscité un énorme lever de bouclier en Angleterre de la part des trans. Il suffit de parcourir les commentaires sur ce site pour se rendre compte que les étoiles uniques y sont plus nombreuses que les autres. Ces notes sont pour la plupart attribuées par des trans eux/elles mêmes.
Ne faisant pas partie de cette communauté trans-genre, je me permets de donner un avis différent. Précisément parce que je connais mal le problème, et que ce court roman est destiné à un jeune public (mais tellement intéressant pour les adultes aussi), j'ai trouvé son argument très utile pour éclairer ma petite lanterne.
L'histoire est racontée par Sam Waver, un jeune garçon dont le frère aîné, Jackson, annonce à sa famille qu'en fait c'est une fille qui vit en lui, à son corps défendant, si je puis dire.
Les parents étant des personnalités influentes (la mère visant, rien que ça, de devenir Première Ministre du Gouvernement), leur réaction initiale est de nier, de refuser, de batailler, et même de rejeter ce trublion qui est né en leur sein.
Le petit frère, lui, raconte. Il raconte ce qu'il vit, comment il ressent ce "coming out", comment il réagit, et évolue à mesure que le temps passe. Le ton de ce récit est très juste, à la fois drôle et émouvant, et surtout très authentique. Le maelström que vit la famille entière est décrit de bout en bout, pour que chacun en comprenne les difficultés. Les quelques coups de griffe assénées au monde politique britannique sont également fort croustillantes.
Alors oui, peut-être est-ce simpliste. Peut-être est-ce une fable. Peut-être que cela ne prend pas en compte tous les problèmes difficiles que ces personnes ont à affronter. Mais pour ceux et celles qui, comme moi, connaissent mal la question, ce livre court est édifiant. Il met l'accent sur la nécessité essentielle d'être tolérant.
John Boyne connaît bien l'intolérance. Il l'a fustigée dans plusieurs de ses romans pour adultes - en particulier dans "The Absolutist", que j'ai traduit : "Le Secret de Tristan Sadler" ; mais aussi dans "The Hearts Invisible Furies" ("Les fureurs invisibles du cœur") hilarant ; dans "A History of Loneliness", qui dénonçait avec courage la pédophilie au sein de l'église catholique en Irlande.
Je considère donc que cet ouvrage efficace est à mettre entre toutes les mains, parce qu'il ouvre la porte vers l'acceptation de ceux et celles qui sont différents, dont les trans, que – je viens de l'apprendre – l'on désigne en anglais, non pas par "he" or "she", mais par le pronom "they", ou "them". À méditer.
* * *
Pour clore ce billet, une trilogie remarquable, dont j'ai découvert le tome 3, Devotion, avant les deux autres :
"MY DEAR I WANTED TO TELL YOU" ,
de Louisa Young.
Belle et intéressante revue littéraire. Merci
RépondreSupprimerVoilà qui me donne envie de me remettre à la langue de Shakespeare, quitte à me faire aider par une prof de mes amies !
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