Le 8 mars prochain sera à
nouveau le jour de la journée de la femme.
Voilà un bel exemple de juxtaposition des genres.
Il fallait les deux termes pour expliciter ce que sera cette date. Essayez d’en
enlever un, et vous verrez, ce sera bancal. Nous savons tous, et j’enfonce une
porte ouverte, là, que c’est l’union qui fait la force, et que plus on est de
fous plus on rit.
Trêve de balivernes, l’heure est grave. Depuis
quelque temps, il est question de remettre en cause ce pour quoi nous avons
passé, femmes et hommes ensemble, beaucoup d’années à nous battre. À savoir,
qu’on nous fiche la paix, à nous autres, les femmes, et que l’État, qui avait
pris le relais des institutions moralisatrices diverses, cesse de décider à notre place ce
qui est bon pour nous.
Nous avons remporté quelques batailles, grâce à des
personnes (aucun genre n’est nécessaire pour qualifier les grandes et
honorables de cette espèce) comme Simone Veil.
Nous avons obtenu beaucoup dans le domaine de
l’égalité des droits. Certes, tout n’est pas encore parfait, mais que de
progrès depuis l’année (1965 !) où nous avons pu ouvrir toutes seules un compte en
banque !
Voir ici pour les dates clefs de cette longue histoire.
Mais voilà que le pendule repart dans l’autre sens.
On nous parle de « genre », en important cette bataille-là des pays anglophones,
et on réintroduit en France la notion, inutile, de guerre des sexes.
J’ai travaillé l’an dernier à une conférence sur le
thème de la littérature de langue anglaise au féminin. Un de mes postulats étant qu’il n’existe pas de littérature
« féminine » ou « masculine », rien que de la bonne ou de
la mauvaise littérature. Et ceci, bien entendu, reste également à définir. Mais
si je mentionne ces termes aujourd’hui, c’est pour insister sur le fait que tous
les domaines appartiennent à tous.
Évident, me direz-vous ? Eh bien, dans ce cas,
pourquoi donc empêcher d’enseigner cette
idée à l’école, en y prônant l'égalité des droits ? Ah, voilà qui doit poser un problème majeur, pour que l’on
agite sous notre nez l’idée de l’intrusion des enseignants dans le milieu
familial, en même temps que celle de la censure de certains ouvrages.
Alors là, il me vient très fort l’idée de remercier
Aloïs Alzheimer, qui, dans sa bienveillance, a frappé la mémoire de certains de
nos hommes (si, si) politiques. Je préfère dire cela que de les traiter
d’incompétents.
En effet, ils ont certainement la mémoire qui
s’efface à mesure que le temps passe, et cela ne peut être que pathologique.
Faisons un petit rappel :
Pas si loin de nous, dans les années 50, on faisait
vendre par les enfants des écoles primaires des timbres très joliment
illustrés. La récolte de cet argent permettrait d’aider à la lutte contre la
tuberculose, qui sévissait encore dans les familles, et qui était propagée par
le contact direct. L'école entrait ainsi dans la sphère privée. Voir ici.
En parallèle, une campagne de lutte contre l’alcoolisme
prenait la même forme. C’étaient également les enfants qui vendaient ces vignettes, et
qui faisaient ainsi la morale dans leur famille, à l’instigation de leur maître (ou maîtresse) d’école.
Mieux (ou pire ?) encore, les maîtres
enfonçaient le clou avec force exercices, et l’aval absolu de tous, sauf
peut-être, des cafetiers :
«Composition :
Pierre Mathieu, qui est maçon, a la
mauvaise habitude de passer une partie du lundi au cabaret. Hier, il est allé
travailler la tête lourde et la vue trouble. Il est tombé de son échafaudage et
on l’a transporté mourant chez lui.
Plan.
1. Pierre Mathieu : ouvrier rangé. – Son
défaut : le cabaret.
2. Tempête : cheminée, réparation. – C’est
lundi !
3. Pierre au travail : manque d’adresse, tête lourde, vue
trouble. – Le vide !
4. Malheureuse femme ! – Malheureux enfants !
– Réflexions ».
« Calcul :
1. En 1897, la France a consommé 1 772 000
hectolitres d’alcool pur. Cherchez quelle longueur il faudrait donner à un
canal de 2 mètres 50 de profondeur et 4 mètres 20 de large pour contenir cet
alcool ?
2. Un ouvrier boit, en moyenne, 2 petits verres à 10 centimes
par jour, mais le dimanche il double cette dépense. Cherchez quelle somme il
aura dépensé : 1. en 1 an ; 2. en 37 ans ? »
On aura deviné à quoi je veux en venir aujourd’hui, non ?
Il est flagrant que notre époque reproduit, sous une forme à peine différente,
les écarts et inégalités qui existaient à celle des Hussards de la République.
Nombre de jeunes enfants sont ignorants
des principes de base, et vivent dans des conditions qui ne sont guère
meilleures que celles des petits paysans de ce temps-là. Pire, ils ont
fréquemment une cellule familiale éclatée, voire inexistante.
La différence majeure tient peut-être au fait que, dans le temps, l’école et
ses maîtres inspiraient le respect, alors que des années de critique systématique (et de
paupérisation) ont rendu la parole de nos professeurs des écoles bien plus
fragile.
Pourtant, ce sont eux qui ont la charge d’enseigner aux enfants comment écouter et, bien sûr, s’exprimer.
En effet, les psychologues mettent
l’accent sur le fait que très souvent, les parents ne « parlent » pas
vraiment à leurs enfants. Ils ne leur demandent pas de s’expliquer, de
reformuler (!) lorsque leur message est inintelligible. Le résultat :
une communication bancale, qui laisse volontiers la place à la violence. Là où
le verbe fait défaut, le poing n’est pas loin.
Mais ceux qui mettent si fort l’accent sur le rôle de la famille sont
souvent ceux qui savent parler, et même à la télé, pour défendre leurs idées.
Très curieusement, ces parents qui s’insurgent contre le fait que l’école
puisse suppléer aux manques des familles sont également les mêmes qui, il n’y a
pas dix ans, réclamaient le retour des leçons de morale à l’école. Je parie qu’ils
souhaitent même renvoyer toutes les femmes à leur cuisine, même si certaines de
leurs égéries ne se privent pas de briguer des postes politiquement corrects.
Morale, quand tu nous tiens...
Alors, où est la logique dans tout ça ?
Il n’y en a pas ? Ah bon, me voilà rassurée. Et persuadée que nous
devons continuer à affirmer tranquillement les droits de l’homme.
Pour ce qui est de ceux de la femme, je vous propose un rendez-vous
culturel à Antibes, le 8 mars prochain, à la médiathèque Albert Camus, où se tiendront des
débats, des rencontres avec des femmes auteur(e)s ; et des échanges en
tous genres. Promis, ils ne seront pas du genre mauvais !
Ci-dessous le détail de cette journée, et de celles qui la précédent.
Bienvenue à tous et à toutes !
Merci Cathy de rafraîchir la mémoire partiellement défaillante de certains... Un grand bravo ...Mais inquiétant tout ça !
RépondreSupprimerGeorgette