En vol

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Image de la superbe chaise de l'artiste SAB

mercredi 19 décembre 2018

DES FANTAISIES DE LA PRONONCIATION

Certains se souviennent sûrement de l'époque où entendre l'accent d'une personne permettait de déterminer son origine géographique plus sûrement que la consultation de sa carte d'identité. 

Ainsi les héros de Pagnol, incarnés au cinéma par des méridionaux tels que Fernandel, étaient-ils identifiables dès la première seconde d'un dialogue. 

Image prise sur wikipedia

Par commodité  personnelle, j'évoque le Midi (et de manière très globale, car les accent niçois, marseillais ou toulousains sont très différents, bien sûr) mais les autres régions aussi avaient leur spécificité, et chacun reconnaissait ainsi les siens. Il y avait une  logique à cette diversité. 



En parallèle, le français parlé "dans le poste" avait valeur de respectabilité, il était pointu, plat, dénué de roulement de R, de sons nasalisés, ou de chuintements divers. C'était la norme, notre "Queen's English" en quelque sorte, la voix de la France. Au cinéma, il y avait des exceptions, tel que Bourvil, parlant de sa bicyclette dans "La grande vadrouille". 
C'est ICI

Il ne vous échappera pas que ces aspects-là n'ont pas totalement disparu, même s'ils perdurent davantage chez les plus âgés d'entre nous. Les plus jeunes, en effet, ont succombé à la mondialisation nationale (sic) de notre langue. Les influences conjuguées de l'anglais, ou plutôt de l'américain, et du parler des banlieues ont produit un idiome original, sinon toujours cohérent pour les plus anciens. 

Et, en parallèle, des glissements se sont produits, dont le résultat est très amusant à qui les observe, ou les entend. 

Par exemple, il n'est plus guère établi de différence entre le O ouvert et le O fermé. Ouvert, comme dans "bonne". Fermé, comme dans "rôti". Cette confusion produit un effet cocasse lorsqu'un (ou une) journaliste à l'accent par ailleurs très normalisé nous parle du "paul" nord, du "paul" d'attraction", ou bien mentionne le maillot "jonne" du vainqueur du Tour de France. Un "tome" tiré d'une trilogie de livres se transforme volontiers en fromage (tomme), le jeu de "pomme" remplace celui de "paume", le joli poème (ode) s'incarne en "Aude", et l'on ne sait plus s'il est question de poisson, d'arbre ou de musique lorsque "sole", "saule" et "soul" (le plus drôle, car souvent prononcé "soule") se mélangent en une joyeuse bouillabaisse !  

Joli exercice, mais trouvez-y l'intrus 
au plan de la prononciation!
(Image prise sur ce site)

J'en déduis qu'en France les régions n'ont plus grand-chose à voir avec les accents, et inversement. Une espèce d'uniformité s'est installée, parfois pimentée à la mode précitée. L'accent dominant, celui qui ressemble à l'accent parisien, est désirable, car standardisé, et la marque d'une ascension sociale réussie. De fait, la vraie différence est à présent sociale, ainsi que c'était le cas en Grande-Bretagne, où un seul phonème classait la personne qui l'émettait dans une classe bien précise – souvenons-nous du délicieux "My Fair Lady". L'accent de nos banlieues a touché le cœur des villes. Certains citadins le miment, pour des raisons diverses, et souvent pour faire "d'jeun", ajoutant ainsi une connotation générationnelle au bouillon linguistique. 

La diversité linguistique est pourtant désirable, elle reflète l'attachement à une identité, à une région, et ceux qui se moquent des accents régionaux font preuve de "glottophobie". Rien que ce mot vous dissuade d'en faire preuve !

Au fond, qu'importe, me direz-vous, du moment qu'on se comprend... Certes, on se comprend, mais parfois de travers tout de même. Je souhaiterais donc que des cours de diction ou de prononciation (nationale et régionales) soient inclus, non dans les programmes scolaires, déjà chargés, mais plutôt dans celui des futurs enseignants, et des journalistes. Quoique, qui les leur donnerait ? 


PS. Et je ne dirai rien ici de la prononciation des   mots anglais par les journalistes français, on va encore me traiter de snob !




2 commentaires:

  1. Article amusant merci Cathie!
    A très bientôt en 2019! bises Stéphanie

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  2. Je rajoute deux exemples, oubliés : "Paul emploie" c'est le "pôle" où on trouve peut-être un emploi. Et la "côte" de tel chanteur n'implique pas qu'on l'a désossé pour faire monter sa cote. Idem pour la bourse.
    À suivre...
    (N'hésitez surtout pas à partager avec moi vos propres trouvailles !)

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