Il me faut avouer ici une lacune datant de quelques décennies : avant cette semaine, je n'étais jamais allée me promener à Cap d'Ail. C'est un comble, en considérant que je suis née à Nice, et que j'ai passé l'essentiel de ma vie dans cette région...
Il a donc fallu la combler, et c'est à présent chose faite, grâce à la balade organisée par l'association artistique VU PAS VU, dont j'ai déjà parlé sur ce même blog.
C'est sous la houlette de la guide-conférencière Maeva Pegliasco que le petit groupe de passionnés d'art et d'architecture s'est mis à arpenter les rues étroites de cette ville (village ?), pour en découvrir les merveilles architecturales datant, pour un bon nombre, de la Belle Époque.
Petit récapitulatif socio-historique, en guise de préambule, grâce aux informations données ce jour-là par Maeva.
Comme d'autres lieux de notre littoral, Cap d'Ail a d'abord attiré des hivernants fortunés, dès le début du 18ème siècle. Ceux-ci venaient pour la douceur du climat méditerranéen. Des Anglais et des aristocrates russes, pour commencer, ont profité du développement du chemin de fer (dès 1880) pour jouir de la "Belle Époque" dans une région récemment devenue française – le comté de Nice ayant été rattaché à la France en 1860.
Ce tourisme-là était mondain, luxueux. Les activités pratiquées étaient le jeu (au casino de Monte-Carlo), les rallyes, les régates. La mer servait de décor : il n'était pas encore question d'y faire trempette, cela ne se produira qu'à partir des années 20, avec la libération des corps...
Ces premiers hivernants furent suivis de riches Américains, et, bientôt, on vit se développer la mode des sports d'hiver. La région devint peu à peu un foyer d'activités artistiques et littéraires, puis musicales : on pense à l'essor du jazz, à Juan-les-Pins, par exemple.
Cap d'Ail, à l'époque, n'existait pas en tant que cité : le lieu était rattaché à La Turbie, et se nommait du reste "La Turbie-sur-mer" ! C'est l'arrivée du chemin de fer qui hâta la création d'une entité communale séparée, dotée de sa propre gare, et, bientôt de sa Poste (essentielle aux vacanciers), de son école, puis de sa mairie.
Comme ailleurs sur la Côte, ces riches visiteurs se mirent à acheter des terrains et à y faire édifier de somptueuses villas, où ils recevaient d'autres hôtes de prestige : des têtes couronnées, des artistes de renom, des personnalités politiques etc.
Le Château des Terrasses
Crédit photo ©Cathie Fidler
Crédit photo ©Cathie Fidler
Notre balade a débuté face au Château des Terrasses, un fleuron de l'architecture éclectique, si typique de notre région. Troisième villa construite à Cap d'Ail, il fut achevé – nous dit le site de la ville – en 1896. Tour à tour résidence d’hiver de la famille impériale de Russie, d’une danseuse du Bolchoï ou du vice-consul d’Angleterre Frederic Buckingham, la demeure accueillera le prince Albert 1er de Monaco, la reine Victoria ou le président français Félix Faure. Le Tsarévitch y passa un hiver, afin de se refaire une santé...
Image empruntée ici.
On note les influences italiennes, les trois corps de bâtiment, les deux tourelles, les balustrades, les toits plats, la magnifique marquise, et on devine l'immensité du parc qui l'entoure, et qui compte plus de 2000 m2 de jardin méditerranéen.
À partir de ce lieu dominant, la balade s'est poursuivie en direction de la mer. Les rues étroites, très étroites, de la petite ville sont bordées de trésors d'architecture...
La Villa Mirasol, avenue Charles Blanc
On note surtout la loggia à colonnes
et les groupes sculptés disposés aux angles,
évocateurs des villas italiennes
crédit photo ©Cathie Fidler
Celle qui est ci-dessus a un nom évocateur : La Villa Mirasol. Quelques détails pris sur ce site, où vous en trouverez d'autres, encore plus techniques :
"La villa d'inspiration classique a un plan symétrique avec deux étages carrés et un sous-sol. Elle est couverte par une terrasse bordée d'une balustrade. L'entrée principale, située au rez-de-chaussée, sur la façade ouest, est précédée d'un porche couvert en terrasse. Les façades nord et sud sont ordonnancées. Leur axe est souligné par deux avant-corps symétriques. Celui situé au nord est percé d'une fenêtre monumentale en plein cintre qui éclaire la cage d'escalier. L'avant-corps sud ouvre sur un balcon filant (au premier étage). Il est constitué (au deuxième étage) d'une loggia à colonnes à chapiteaux doriques sur lesquels retombent des arcs en plein cintre. La loggia ouvre à l'est et à l'ouest sur le toit-terrasse par deux portes latérales. Les fenêtres situées au sud de part et d'autre de l'avant-corps, sont agrémentées de balcons ; celles situées à l'ouest et à l'est, de balconnets en ferronnerie. Les angles des façades sont soulignés par des chaînages en enduit. La distribution intérieure n'est pas connue. La façade sud a été modifiée par l'ajout d'une porte-fenêtre sur le trumeau central, au premier étage. Une piscine a été aménagée à l'emplacement du toit-terrasse de la loggia. Le jardin, de niveau, est irrégulier."
Il n'est pas anodin de noter que cette villa a appartenu à Gabrielle Reval. Bon, j'avoue que j'ignorais qui elle était jusqu'à ce que Maeva nous informe qu'elle fut professeur, auteur, et co-fondatrice du Prix Femina !
Allez, un petit plan maintenant, pour mieux se repérer :
La Villa Lumière, aux allures de château-fort...
Construite vers 1902 pour Auguste Lumière
faisait partie d'un ensemble de
trois appartenant à la même famille
dont subsiste encore la villa Hélios
(2, avenue François de May).
L'édifice a été modifié au cours
des années 1950
des années 1950
par l'ajout d'un étage.
Il est peut-être utile de rappeler quelques détails concernant la famille Lumière, que l'on retrouvera bien sûr sur Wikipedia :
"Les frères Lumière ont déposé plus de 170 brevets, essentiellement dans le domaine de la photographie. Ils inventent notamment les plaques photographiques sèches instantanées prêtes à l'emploi dites "Étiquette Bleue" en 1881. C'est la vente de ces plaques qui a fait leur fortune. En 1893, les deux frères sont à l'origine de l'obtention de la couleur sur plaque photographique sèche, dite "autochrome", que Louis Lumière, qui paradoxalement n'aime pas le cinéma, considère comme étant sa plus prestigieuse invention, celle à laquelle il a consacré plus de dix années de sa vie."
Détails, depuis le portail
Crédit photo © Cathie Fidler
Un peu plus bas, on découvre l'hôtel Eden, ou plutôt l'ex-hôtel Eden, à présent une résidence privée. Il est intéressant de noter que la Villa Lumière, ci-dessus a été orientée, non vers la mer, mais vers cet édifice original et novateur pour l'époque.
Crédit photo © Cathie Fidler
Image et commentaire pris sur ce site
Le corps de bâtiment situé face au portail est le plus ancien.
Sa façade ordonnancée scandée par trois avant-corps
est rythmée de pilastres et de frontons.
De part et d'autre du porche d'entrée,
deux vérandas (disparues) abritaient la salle de restaurant.
L'hôtel offre dès sa création une capacité de 150 chambres
L'hôtel offre dès sa création une capacité de 150 chambres
équipées du confort moderne : lumière électrique, ascenseur
salles de bain privées, et "tout à l'égout".
Une annexe de 50 chambres avec balcons,
bâtie au début du XXe siècle, prolonge l'édifice.
Un porche est ajouté dans les années 1930 sur la façade est.
En 1945, l'hôtel est divisé en appartements.
Notre visite s'est poursuivie par une jolie promenade en direction de la mer, ponctuée d'échappées telles que celle-ci :
Ou de vues panoramiques :
Promenade le long du "Sentier des douaniers"
Credits photos © Cathie Fidler
Credit photo © Jacques Lefebvre-Linetzky
Pour en revenir aux arts, une petite visite de la Villa des Camélias s'imposait. L'une des plus anciennes bâtisses du lieu, elle abrita un temps (en 1941) André Malraux.
À présent transformée en musée privé, elle propose des expositions permanentes et temporaires, que je vous engage vivement à découvrir – ainsi que son étonnant piano mécanique, parfaitement restauré, en état de marche, dont le fonctionnement complexe nous a été expliqué de manière très claire, à l'aide d'une magnifique démonstration !
Credit photo © Jacques Lefebvre-Linetzky
Allez, on va terminer cette balade avec quelques images du Sentier des douaniers, que nous avons suivi depuis le Cap Rognosco jusqu'à la Pointe des Douaniers, où nous avons pu admirer les restes concassés du fameux volcan du Cap d'Ail, heureusement éteint depuis des milliers d'années.
Il y a maintes autres villas superbes à Cap d'Ail, comme par exemple la villa "Capponcina" qui appartenait à Lord Beaverbrook, un ami de Sir Winston Churchill : ce dernier y venait si souvent en vacances, pour y peindre, notamment, que la ville de Cap d'Ail le nomma "maire honoraire" ! Mais elles sont souvent dissimulées par de grands portails, ou bien elles surplombent le chemin des douaniers sans qu'on puisse en voler l'image... Tant mieux pour ceux qui y habitent encore !
Deux dernières photos, alors que le soleil commençait à décroître... et que notre balade touchait à sa fin.
La Villa l'Hermitage....
Credit photo © Cathie Fidler
Superbe lumière du soir sur la façade aux décors peints
de cet immeuble visible depuis la Basse Corniche
Crédit photo © Cathie Fidler
Voilà. La promenade est finie ! J'espère vous avoir donné envie d'aller découvrir ces merveilles, et ce morceau de littoral unique. La lumière méditerranéenne est magique sur ces architectures si flamboyantes. La balade à pied (de quelques six kilomètres, tout de même, avec une belle grimpette pour rejoindre la Basse Corniche en fin de parcours) est un plaisir à ne pas bouder, surtout hors saison, si on a la chance d'être disponible à ce moment...
Vous me la raconterez ?
Vous me la raconterez ?
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Pour rappel, ce site vous aidera à retrouver l'emplacement de ces magnifiques villas, et de celles que je n'ai pu photographier, et il vous en donnera l'emplacement précis.
Merci à Vu pas Vu, et à Maeva Pegliasco, qui a si bien préparé pour nous cette belle excursion.
Merci à Vu pas Vu, et à Maeva Pegliasco, qui a si bien préparé pour nous cette belle excursion.
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