Il n’y a pas d’âge pour
être sourde.
Voilà un handicap dont les victimes n’ont pas que
80 ans. Et qui frappe de manière inattendue de jeunes gens aussi, à la suite,
parfois, d’une otite mal soignée ou pour une raison inexplicable, comme dans le
cas de la jeune femme dont je vais parler aujourd’hui, Isabelle Fruchart, dont
certaines cellules auditives ont bizarrement disparu un pas très beau jour, la
laissant sourde à 70%, à l’âge de 14 ans. Diagnostic seulement posé à l'âge de 26 ans.
Bon, voilà. Et puis quoi ?
Et puis, merveille des merveilles, avec un talent
exceptionnel, Isabelle Fruchart a fait de ces années de silence cotonneux un
régal pour les sens des autres, de nous autres spectateurs de théâtre. Avec le
concours de Zabou Breitman, elle raconte, sur scène, le journal de son presque
calvaire, jour après jour, jusqu’à celui où, petit miracle de la technologie
moderne, elle se voit enfin appareillée convenablement, et à nouveau, pas à
pas, à l’écoute du monde, à l'âge de 37 ans. Cela s’appelle :
JOURNAL DE MA NOUVELLE OREILLE.
Dans un décor merveilleux, sobre et évocateur à la
fois, Isabelle Fruchart nous entraîne dans un monde que nous reconnaissons,
pour l’avoir fréquenté. Pire, nous en avons même parfois imaginé les dialogues,
et produit les mimiques : « Parle plus fort, elle ne t’a pas
entendu »… « Je les entendrais mieux s’ils articulaient ! »
Pendant quatre-vingts minutes, elle nous fait
partager sa souffrance, ses enthousiasmes, son impatience, ses découvertes, ses
accommodements, son amertume parfois, sa lucidité, toujours, et surtout,
surtout, elle nous fait prendre la mesure de son immense talent de comédienne,
de danseuse et de chanteuse.
On en sort ému, touché, bouleversé. Moi qui n’avais
rien lu avant le spectacle, je ne savais pas que c’était autobiographique. Je
ne saurais dire si c’est important ou pas. Ce qui en reste, c’est la justesse
de ce témoignage, qui touche à tous ceux et celles qui, pour une raison ou une
autre, se trouvent « différents » dans une société qui accepte si mal
les « différences » quelles qu’elles soient. Pour en faire partie, des
deux côtés, je le sais.
Alors, de telles réalisations ont plusieurs effets.
Celui, que je viens de décrire, de nous faire passer une soirée parfaite, et
celui, à plus long terme, de nous amener à nous poser la question de la
tolérance.
Par les temps qui courent, c’est plutôt utile. Et
la maison pour ça, comme disait l’autre (Claudel ?), c’est parfois Le
Théâtre !
À Nice, pour encore quelques jours, ICI. Salle Michel Simon.
(Co-production du TNN)
Et n’oubliez pas que, pour faire connaître les
belles choses, rien ne vaut le bouche à oreille !
Merci Cathie .... Tu donnes envie vraiment d'aller voir ce spectacle
RépondreSupprimerBises
Très touchée par les questions de différences, d'inaptitudes, de tolérance, d'écoute et de respect des autres, j'aimerais bien voir ce spectacle ! En aurai-je le temps ? Bises
RépondreSupprimerGuess who