Un
auteur, ça mange, et après un week-end comme celui que nous avons vécu dernièrement à Mouans-Sartoux, ça a même
besoin de reprendre des forces. Et quoi de plus réjouissant pour remplir son chariot, que de faire un petit tour au marché de la Libération, à
Nice, plus communément appelé « La Libé » ?
La Bibliothèque Raoul Mille
Ce
mercredi matin, ce marché était plus que calme.
Pas pour
très longtemps.
Je vais
tenter de vous raconter le pittoresque remue-ménage dont j’ai été le témoin.
Remontant le
large trottoir, devant l’ancienne Gare du Sud – à présent devenue la
Bibliothèque Raoul Mille –, je suis tombée sur un groupe de très petits
enfants en sortie scolaire. Revêtus de gilets jaunes fluo, ils
marchaient en rangs serrés, mais pas du tout organisés, en piaillant comme des
moinillons.
Ils
s’arrêtaient de temps à autre devant un marchand de légumes, pour observer,
sous la direction de leur maîtresse (oui, j’aime à utiliser ce terme désuet) les
légumes de saison : potirons, potimarrons, citrouilles diverses, dernières
courgettes et premiers choux.
La
maîtresse achètera d’ailleurs de quoi faire une soupe au potiron, qu’ils
prépareront ensemble, une fois rentrés à l’école, ce qui les changera des
pâtes et des frites, tout en leur démontrant que la cuisine, même pour Halloween, ce n'est pas si sorcier.
Je continue mes emplettes et, quelques instants plus tard, voilà que je retrouve les mêmes marmots devant l’étal (superbe) de mon poissonnier, lequel répond au nom de Pierrot – et je crois même qu’on n’a pas besoin de l’appeler pour qu’il réponde ! C’est plutôt lui qui joue les harengères, sa voix doit porter au delà du pont de chemin de fer.
Son aïeule, sans doute...
Son coffre massif est ceint d’un
tablier ad hoc (forcément) qui le protège des éclats d’écailles de poisson. Enfin, je crois, mais peut-être que je brode un peu, là. Pour
compléter ce tableau pittoresque, j’ajouterai que les parties visibles de son
anatomie sont fort tatouées. Ça, c'est vrai.
Et voilà
le Pierrot qui se colle devant eux. Il les domine de toute sa hauteur en tenant
à la main un énorme poulpe, une pieuvre digne de figurer dans un film d’horreur.
Il pointe, pour la détailler, chaque partie de la malheureuse bestiole, dont il
secoue en même temps les tentacules dans tous les sens, donnant ainsi aux
gamins effarés une saisissante leçon d’anatomie animale.
Il
s’empare ensuite d’une sole, dont il décrit amplement les
petits yeux, le corps aplati (je vous passe le reste) et termine en leur proposant
de goûter des petits bouts de saumon mariné, qu’il agite devant leur bouche
comme autant de hameçons. Les plus hardis (et les accompagnatrices avisées) avalent
l’appât avec gourmandise – pour l’avoir goûté, je sais que son saumon est
excellent. D’autres, réticents, froncent leur petit nez en se reculant avec inquiétude.
Mais, en gros, la tête de ces gamins vaut le spectacle qui se déroule devant
les yeux de quelques passantes aussi attendries et amusées que je le suis.
Pour
terminer sa « leçon de choses », Pierrot-le-prof' clame haut et fort : « Mangez
du poisson, mangez du poisson ! C’est bon pour la santé, c’est bon pour le
poissonnier ! »
Barbe-bleue tonitruant, peut-être, mais que de gentillesse dans son regard, et d'attention pour les petits...
Barbe-bleue tonitruant, peut-être, mais que de gentillesse dans son regard, et d'attention pour les petits...
Je ne
sais pas si les enfants auront tout compris de cette séance d’école
poissonnière, mais ce qui est sûr, c’est qu’ils n’oublieront pas que les rencontres simples du quotidien sont souvent celles qui vous instruisent le mieux.
Par bonheur,
personne ne s’est posé la question de savoir si ce poissonnier avait obtenu
tous ses diplômes de compétence en matière de « communication » avec
les enfants, ni imposé aux professeurs des écoles qui accompagnaient ce groupe
de « briefer » le bonhomme auparavant, de désinfecter en amont chacune
de ses paroles pour la rendre pédagogiquement correcte.
Certains à Nice ont, semble-t-il, gardé une once de bon sens.
NB. Aucun de leurs jolis minois n’est visible sur cette photo, ainsi que
le requiert la loi. Pierrot-de-Nice (prononcez, comme lui, "de Naïce"), en revanche, nous a autorisés à reproduire le sien. Admirez l'animal ! Le saumon, bien entendu.
Ah ah ah j'adore...je connais bien le Pierrot ...Je connais tous les commerçants puisque j'étais chef de services des marchés de PLEIN AIR à la Ville de Nice...J'adore ton récit comme d'habitude c'est génial !! bises
RépondreSupprimerGeorgette