MON FILS est un film israélien réalisé par Eran Riklis. Sorti l’an dernier, il est encore possible de voir, à cette date, dans 34
salles françaises.
C’est lors de sa dernière projection à Nice que
j’ai eu la chance de le découvrir et, par voie de conséquence le désir d’en parler ici, pour vous engager à le guetter en salle ailleurs, ou lorsqu’il sortira en DVD.
Le propos de ce film est assez simple : Iyad, un
jeune Arabe israélien très brillant obtient une place dans un internat juif
réputé de Jérusalem, afin d’y poursuivre ses études, réjouissant ainsi le cœur de son père,
qui fut lui-même jadis empêché de poursuivre ses études universitaires pour
cause de « terrorisme ». Iyad se trouve être le seul Arabe de ce
lycée, où il rencontre et tombe amoureux de Naomi, au grand dam de leurs
familles respectives. Naomi, est incarnée par la ravissante Danielle Kitzis au sourire craquant, dont le jeu nuancé est parfait de bout en bout.
Dans le même temps Iyad crée des liens d’amitié avec
Yonatan, qui est atteint d’une grave maladie, un genre de myopathie, qui le
diminue petit à petit. Iyad s’en occupe avec le plus grand dévouement, et se
trouve ainsi quasi-adopté par la mère de Yonatan, Edna, personnage superbement
interprétée par Yael Abecassis.
Edna à la fenêtre : ce plan d'une fenêtre donnant sur Jerusalem
est une image récurrente, qui ouvre l'intrigue pour la situer
au delà du décor resserré
de l'appartement.
Il n’est pas question ici de révéler les méandres du scénario de ce beau film. Juste d’en signaler l’importance.
Loin des discours convenus, cette
histoire souligne avec beaucoup de sensibilité la difficulté pour une minorité,
quelle qu’elle soit, de s’intégrer à la majorité dominante. Afin d’être
accepté, Iyad devra sacrifier son identité profonde.
Cette démarche à la fois courageuse et inquiétante
a été longuement illustrée dans le film SUNSHINE, d’Itzvan Szabo, dont j’ai
précédemment rendu compte ici. On ne peut s’empêcher de penser à la conversion
fréquente, avant-guerre, de nombreux Juifs allemands ou autrichiens, pour des
raisons exactement identiques à celles de Iyad.
MON FILS est également une sorte de Roméo et
Juliette contemporain, traité avec humour – souvent –, et sensibilité,
toujours. Rien ne nous touche davantage que le sort d'amants contrariés !
Mais ce qui frappe en fin de compte, c’est le rôle
des femmes dans ce conflit. Si la mère de Naomi paraît caricaturale dans son
refus de voir sa fille amoureuse d’un Arabe (« Dis-moi
que tu te drogues ou que tu es lesbienne, ou que tu as un cancer, mais pas que
tu sors avec un Arabe ! », tels sont les propos que rapporte Naomi à Iyad), la mère de Iyad, et surtout celle de
Yonatan sont des merveilles d’amour et de compréhension.
Ce film est une belle fable, qui évite pourtant de servir un discours monolithique sur les inégalités de traitement des
citoyens arabes de cette démocratie menacée de toutes parts. Son propos, amené par petites touches subtiles, est
intemporel. Partout où règne la guerre et les affrontements il y a des abus de
pouvoir, des positions exacerbées, des injustices. Le réalisateur démontre qu’au-delà des
clichés, les êtres humains, et notamment les femmes, sont capables de résoudre
les problèmes à leur manière, quitte à brusquer les conventions, et la loi. Par
amour maternel. Il met également en lumière tout ce qui rapproche l’islam et le
judaïsme dans leurs valeurs essentielles, au lieu de crier haro
sur un quelconque méchant. En cela Eran Riklis** fait œuvre utile et pacifiste, ce qui
n’est pas non plus négligeable par les temps qui courent.
Et, en parlant de démocratie, voilà ce qu'il dit : "On a l'air d'oublier qu'Israël est la démocratie la plus démocratique qu'on puisse imaginer. Il n'y a pas de censure en Israël."***
Le titre français de ce film*, qui peut surprendre au départ,
est finalement explicité de la manière la plus délicate qui soit : peu
importe la communauté à laquelle une mère appartient, car celle-ci sera
toujours capable de se transformer, tel un caméléon, par amour pour un fils.
(Et ce n’est pas propre qu'aux mères juives, quoiqu’on
en dise !)
ICI, la bande annonce
Et là, un autre article sur le film.
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*Titre original : Dancing Arabs
**Eran Riklis fait partie des 20% d'Arabes israéliens.
***source de la citation, ici.
**Eran Riklis fait partie des 20% d'Arabes israéliens.
***source de la citation, ici.
N.B. Le film sortira le 17 juin en DVD, et il est encore visible dans les villes suivantes (à cette date) :
RépondreSupprimerAlbi
Cannes
Cavaillon
Dreux
Le Mans
Lunéville
Marseille
Montpellier
Nice (au Mercury)
Paris
Quimperlé
Saint-Avold
Saint-Gratien
Tonneins
Versailles
Villeneuve-d'Ascq
It feels right that you should publish this during Pesach, when many -- and not just the religious -- must face the deeper issues of individual and group identity. This at a time of ever more splintering into what Amin Maalouf calls "les identités meurtrières".
RépondreSupprimerThank you, Cathie, for yet again gently provoking self-examination and creative thought.
Peter