En vol

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Image de la superbe chaise de l'artiste SAB

mercredi 23 janvier 2013

À QUELLE HEURE ON MEURT ?




Lorsque mes enfants étaient petits, dans les années 80 du siècle dernier, je me souviens avoir manifesté avec véhémence, aux côtés des instituteurs ou des maîtresses d’école d’alors, et de la FCPE, pour réclamer un changement des rythmes scolaires. 
En étudiant les travaux d'un spécialiste de la chronobiologie, dont j’ai oublié le nom, nous avions compris que nos écoliers avaient des journées de folie, qu’aucun adulte n’aurait, comparativement, accepté de subir.

Nous déclarions donc que tout irait mieux le jour où un ministre de l'Éducation s’engagerait enfin à se pencher sur la question. Quelques tentatives eurent lieu, mais le résultat d’alors fut bien bâtard :

Une fois pris en compte les intérêts spécifiques de l’industrie du tourisme, qui, il y a déjà trente ans, ont été à l’origine de nos trois zones distinctes de vacances (causant un casse-tête phénoménal aux familles recomposées ou éparpillées désireuses de se retrouver), une fois ménagées les requêtes des divers acteurs de la vie économique, l’année a été redécoupée, sans tollé majeur. Les grandes vacances se sont trouvées légèrement raccourcies, et le rêve d’une semaine des quatre jeudis a laissé place à la semaine anglaise, faisant cadeau du samedi aux Français, et aux autres.

Mais l’intérêt des petits enfants, là-dedans, on s’est largement assis dessus. Il s’est trouvé des gens pour dire que le mercredi de liberté permettait une bonne coupure au milieu de la semaine (dans mon enfance c’était le jeudi, mais le samedi on allait à l’école toute la journée), favorable à une grasse matinée. C’était peut-être vrai, mais cela arrangeait surtout de nombreux parents qui, eux, ne travaillaient plus guère le samedi.

D’autres ont rappelé la convention avec l’Église catholique, qui avait obtenu de la République laïque le don d’une demi-journée (au moins), pour catéchiser les enfants.
À noter que peu d’enfants s’y consacraient, ils faisaient plutôt de la danse, du foot ou du judo ce jour-là…

Les parents, avant, tout comme maintenant, cherchaient la solution idéale qui leur permettrait de faire garder leurs enfants pendant leurs longues heures de travail, et de transport.

Les études surveillées (payantes) se sont créées davantage dans ce but que pour faire exécuter leurs devoirs aux écoliers. Devoirs qui, si ma mémoire reste bonne étaient formellement proscrits par le Code Soleil, pour des raisons évidentes d’égalité entre les classes sociales. On a continué à s’asseoir là-dessus aussi.

Mais comme nous le savons depuis La Fontaine, on ne peut contenter tout le monde et son père. Et encore moins le corps enseignant et les parents, les ministres et les administrés. (Rendez-vous la semaine prochaine si vous n’entrez dans aucune de ces catégories !)

Peu nous en chaud que la santé des enfants requière des horaires plus légers, une semaine et une année mieux équilibrées. Tout ce que les adultes voient, c’est leur intérêt immédiat. En lisant ceci, on comprendra ce qu’il en est.
On peut aussi s'instruire en regardant ce qui se passe ailleurs On nous en rebat suffisamment les oreilles pour qu'on ne l'ignore pas !

Je fais partie de celles et ceux qui comprennent le souci de garde des parents qui travaillent, et loin de moi l’idée que la charge des enseignants soit alourdie, sans compensation aucune. Mais enfin, pour une fois, un ministre s’attaque à un problème de fond. On peut imaginer qu’il a tout de même un peu étudié la question. Il s’est également senti soutenu dans ce projet lors de la campagne électorale, voire approuvé par les acteurs concernés (dont la même FCPE, qui crie à présent haro sur le baudet). 
Un projet qui est déjà appliqué avec succès en plusieurs endroits, voir ici.

Le ministre actuel s’y attèle peut-être avec maladresse, mais faut-il pour autant se mettre immédiatement en grève pour exprimer son désaccord ? Crier haut et fort, à droite et même à gauche, qu’il a mis la charrue avant les bœufs ? Cela fait des décennies que l’on s’occupe ni de la charrue, ni des bœufs, et encore moins des petits humains !

Sur ce blog, je ne me mêle pas vraiment de politique. Mais ce qui touche à mon domaine de compétence me concerne encore. Et me consterne.
Ce que je vois, c’est que c’est compliqué : Les parents ne veulent pas que la journée d’école soit raccourcie, parce qu’ils ne sauront que faire de leurs enfants. Les enseignants craignent un allongement de leur temps de travail. Les locaux ne sont pas partout adaptés pour y faire autre chose que la classe. L’argent manque pour organiser pour tous les loisirs post-heures de classe que certains parents payent cher ailleurs pour leurs enfants, lesquels se retrouvent avec des emplois du temps dont le ministre ne voudrait pas. Et plus une seule minute pour rêver, ou mieux, s’ennuyer. 

On rêve, sauf que c’est un cauchemar. Parce qu’à force de ne jamais rien vouloir essayer, rien vouloir changer à ce qui ne marche pas, on meurt vivant, face à une horloge arrêtée. Mais, attention, en demandant avec insistance, et frilosité : « À quelle heure ? »

Personnellement, je ne veux pas mourir tout de suite, et même si je ne suis plus dans le bain éducatif (mais encore très naïve) je vais contre-manifester, et dire ma reconnaissance à tous ceux et celles qui vont continuer à prendre le risque de devenir très impopulaires, en défendant la cause des enfants.



4 commentaires:

  1. BRAVO CATHIE !!!!!! Bises
    Georgette

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  2. voilà qui me rappelle une petite passe d'armes avec une mère d'élèves (représentant une fédération) lors des discussions précédant la suppression des cours du samedi au lycée. En échange d'un long week-end, il était question d'ouvrir de 8h à 18h avec une heure de pause à 11h ou midi ou 13h et la perspective de très longues journées pour ceux qui avaient un peu d'appétence pour les options. Nous étions quelques uns à nous inquiéter de la lourdeur de ces journées et la mère m'avait lancé :"alors, vous pensez que nos enfants ne méritent pas un week-end comme nous?" Et je n'avais pas pu m'empêcher de lui répondre "pour le week-end, je ne sais pas,
    mais pour les parents je suis sûr qu'ils méritaient mieux!"

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  3. BELLE ANALYSE A PUBLIER PARTOUT ........VAS Y CATHERINE SOUTIEN TOTAL
    DENISE

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  4. Mon ancienne condisiciple et amie, Geneviève Wagner, m'envoie ce commentaire que je vous livre avec son autorisation.

    Et oui Chère Cathie, depuis 40 ans (que je suis "l'à-faire" éducative ) il faut bien admettre que les syndicats enseignants majoritaires (je ne dirais pas la couleur ) ont prioritairement défendu leur propres intérêts corporatistes avant l'intérêt "bio-chrono-physiologique" des enfants. Intérêts bien perçus intuitivement, d'où leurs ratiocinations justificatives mais qui ne peuvent résister maintenant face à l'intérêt de l'enfant et aux connaissances en sciences cognitives (ma spécialité ) que nous avons acquises.

    Cependant le métier est devenu si socialement difficile que je ne critiquerai pas davantage aussi --> Petit rappel incontournable.

    Oui le cerveau des enfants est en attente de développement. Son néo-cortex frontal (siège des capacités essentielles de Sapiens sapiens) n'est à la naissance qu'un fouillis inorganisé de connections neuronales en attente d'organisation adaptée et adaptative. Cette organisation est sous la dépendance directe de tous les "nutriments socio-affectifs et intellectuels qui seront rencontrés. Cette organisation est explosive dans l'enfance à raison de plusieurs millions de connections neuronales nouvelles créées chaque seconde et brûlant/ consommant 60% de l'oxygène total ( 20% seulement chez l'adulte=conso pour la "plasticité" ). Voilà ce que l'évolution "bio-logique » à inscrit dans nos gènes néocorticaux : ne rien programmer..avec fixité (ne pouvant présumer de l'environnement futur).Être alors ce que le milieu ( Nos ascendants? ) feraient de nous !?

    À charge alors à chaque génération de recommencer cette mise à VIE et à Humanité ??? Oui Cathie l'école et notre si cher collège Capron nous ont appris que la "culture est cumulative "mais l’école il y a 40 ans ne savait pas encore ( les poètes et les philosophes eux s'en doutaient )que, à chaque naissance tout est à remettre sur le métier de l'éducation avec l'outil cerveau. L'objet le plus complexe de l'univers. Objet qui chez Sapiens sapiens est devenu le support, mais en simple potentialité de 3 entités immatérielles:
    1. Liberté d'être d'abord ce que l'on a fait de moi puis ce que, conscient je désire),
    2 la Responsabilité, de le faire ou pas,
    3 l'Equité qui me demande alors, dans mon travail d'Humanité, de déjouer les-inégalités-de-NATURE pour instaurer de CULTURE-plus-d'Equité. Merveilleuse VIE. Merveilleuse planète. Homme sublime mais seulement en potentialité ... car sous conditions ... la liberté, la responsabilité, la connaissance et donc la « con-science’ des autres humains !!

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